Cette femme qui ne parlait qu’avec les versets du Coran
Ce récit nous est rapporté par l’imam Ibn Hiban, un savant spécialiste de la science du Hadîth né en 270 et décédé en 354 de l’Hégire. Dans son recueil, il relate une histoire qui a eu lieu au temps des tabi’in. Les tabi’in, ce sont les musulmans ayant rencontré au cours de leur vie des Compagnons du Prophète (ﷺ). On peut parler, en quelque sorte, de la deuxième génération de musulmans. Mais revenons à cette histoire… C’est en fait une discussion entre le savant Ibn Al Mubarak et une vieille femme qu’il rencontra dans le désert. Elle avait une particularité hors du commun. Oumma Up vous relate la discussion d’Ibn Al Mubarak et de la femme qui ne parlait qu’avec les versets du Coran.
La rencontre
Ibn Al Mubarak raconte qu’il voyageait afin d’accomplir le pèlerinage et visiter la tombe du Prophète (ﷺ). Il aperçut une femme, toute vêtue de noir, avec une djellaba et un khimar. Il s’adressa à elle en ces termes : « Paix et miséricorde d’Allah sur vous. »
La femme répondit alors : « “Salam” (paix et salut)! Parole de la part d’un Seigneur Très Miséricordieux. » qui n’est autre que le verset 58 de la sourate 36.
Le dialogue
Ibn Al Mubarak : « Qu’Allah vous fasse miséricorde, que faites vous dans cet endroit? »
La femme : « Et quiconque Allah laisse égarer, n’a plus personne pour le guider. » (Sourate 13, verset 33).
Ibn Al Mubarak comprit qu’elle s’était perdue. Il la questionna alors sur sa destination.
La femme : «Gloire et Pureté à Celui qui de nuit, fit voyager Son serviteur [Muhammad], de la Mosquée Al-Haram à la Mosquée Al-Aqsa » (sourate 17, verset 1).
Ibn Al Mubarak en déduit qu’elle avait accompli son pèlerinage et voulait visiter la mosquée sacrée d’Al-Aqsa, à Jérusalem. Il lui demanda combien de temps elle était à cet endroit.
La femme : « Trois nuits tout en étant bien portant. » (sourate 19, verset 10).
Ibn Al Mubarak : « Avez-vous de quoi manger ? »
La femme : « C’est Lui qui me nourrit et me donne à boire. » (sourate 26, verset 79)
Ibn Al Mubarak : « Comment faites-vous les ablutions ? »
La femme : « Si vous ne trouviez pas d’eau, alors recourez à une terre pure. » (sourate 4, verset 43)
Ibn Al Mubarak l’informa qu’il avait avec lui de quoi manger et lui proposa de la nourriture.
La femme répondit : « Puis accomplissez le jeûne jusqu’à la nuit. » (sourate 2, verset 187)
Ibn Al Mubarak : « Il nous est permis de manger durant le voyage.»
La femme : « Mais il est mieux pour vous de jeûner; si vous saviez! » (sourate 2, verset 184)
Ibn Al Mubarak, étonné de cette conversation pour le moins inhabituelle, lui demanda « Pourquoi ne me parlez vous pas comme je vous parle ? »
La femme rétorqua : « Il ne prononce pas une parole sans avoir auprès de lui un observateur prêt à l’inscrire. » (sourate 50, verset 18)
Ibn Al Mubarak : « Quel type de personne êtes vous ?»
La femme : « Et ne poursuis pas ce dont tu n’as aucune connaissance. L’ouïe, la vue et le cœur : sur tout cela, en vérité, on sera interrogé.» (sourate 17, verset 36)
Ibn Al Mubarak : « Excusez mon erreur !»
C’est ainsi que la femme le rassura, toujours à sa manière : « Pas de grief contre vous aujourd’hui! Qu’Allah vous pardonne. » (sourate 12, verset 92)
Le voyage ensemble
Ibn Al Mubarak lui proposa alors qu’elle monte sur son chameau le temps qu’ils rejoignent sa caravane.
La femme : « Et le bien que vous faites, Allah le sait. » (sourate 2, verset 197).
Ainsi, Ibn Al Mubarak fit accroupir son chameau pour qu’elle puisse monter.
La femme formula cette demande : « Dis aux croyants de baisser leurs regards ». (sourate 24, verset 30)
Ibn Al Mubarak lui indiqua de monter sur le chameau, mais à ce moment-là, la bête essaya de s’enfuir, en lui déchirant au passage ses habits.
D’une patience à toute épreuve, la femme dit : « Tout malheur qui vous atteint est dû à ce que vos mains ont acquis. » (sourate 42 :30)
Ibn Al Mubarak lui conseilla de patienter. La femme monta finalement sur le chameau et dit : « Gloire à Celui qui nous a soumis tout cela alors que nous n’étions pas capables de les dominer. C’est vers notre Seigneur que nous retournerons.» (sourate 43, versets 13 et 14). Ibn Al Mubarak prit la corde, pressa le pas tout en criant pour presser l’animal.
La femme lui conseilla alors : « Sois modeste dans ta démarche, et baisse ta voix. » (sourate 30, verset 19). Ibn Al Mubarak écouta les recommandations de la vieille dame. Il se mit à marcher doucement, tout en déclamant des poèmes.
La femme : « Récitez donc ce qui (vous) est possible du Coran. » (sourate 73, verset 20).
Ibn Al Mubarak : « Il vous a été donné un bien immense. »
La femme : « Mais seuls les doués d’intelligence s’en souviennent. » (sourate 2, verset 269).
Après plusieurs heures de voyage, Ibn Al Mubarak lui demanda si elle avait un époux.
La femme : « Ô les croyants! Ne posez pas de questions sur des choses qui si elles vous étaient divulguées, vous mécontenteraient. » (sourate 5, verset 101).
Ibn Al Mubarak pris alors la décision de ne plus l’interroger.
Le récit de la femme qui ne parlait qu’avec les versets du Coran : le retour auprès des siens
Ils finirent par rattraper la caravane. Il lui demanda si elle connaissait quelqu’un dans cette caravane.
La femme répondit : « Les biens et les enfants sont l’ornement de la vie de ce bas monde. » (sourate 18, verset 46).
Ibn Al Mubarak comprit qu’elle avait des enfants et lui demanda ce qu’ils faisaient à La Mecque.
La femme : « Ainsi que des points de repère. Et au moyen des étoiles (les gens) se guident. » (sourate 16, verset 16). Cette réponse, à première vue énigmatique, signifiait que ses enfants étaient des guides pour les voyageurs. Ibn Al Mubarak se dirigea alors vers les habitations et demanda à la femme le nom de ses enfants.
La femme : « Et Allah avait pris Ibrahim pour ami privilégié. » (sourate 4, verset 125), « Et Allah a parlé à Moussa de vive voix » (sourate 4, verset 164) « Ô ! Yahyâ, tiens fermement au Livre (la Thora)! » (sourate 19, verset 12).
Ibn Al Mubarak les appela alors : « Ibrahim ! Moussa ! Yahya ! ». Lorsqu’ils vinrent à sa rencontre, Ibn Al Mubarak remarqua en eux une incroyable beauté, qu’il compara à celle de la lune. Après s’être assis auprès de leur mère, celle-ci leur dit : « Envoyez, donc l’un de vous à la ville avec votre argent que voici, pour qu’il voie quel aliment est le plus pur et qu’il vous en apporte de quoi vous nourrir. » (sourate 18, verset 19). Un d’eux partit alors acheter de quoi manger afin de l’offrir à Ibn Al Mubarak.
La femme : « Mangez et buvez agréablement pour ce que vous avez avancé dans les jours passés. » (sourate 69, verset 24).
Le dénouement
Ibn Al Mubarak s’adressa alors aux enfants : « Je ne mangerais ce repas que lorsque vous m’aurez informé des raisons qui poussent votre mère à ne parler qu’avec le Coran »
Les enfants répondirent avec cette phrase qui force l’admiration : « Voilà 40 ans que notre mère ne parle qu’avec le Coran de peur de prononcer une parole inconvenante et causer de ce fait la colère du Miséricordieux ».
Ibn Al Mubarak s’exclama, en citant, lui aussi, un verset du Coran : « Telle est la grâce d’Allah qu’Il donne à qui Il veut. Et Allah est le Détenteur de l’énorme grâce. » (sourate 57, verset 21).
Ce qu’il faut retenir de cette femme qui ne parlait qu’avec les versets du Coran
Ce récit force l’admiration, c’est certainement une impression à l’unanimité. Cependant, au delà de ce constat, il nous faut aussi nous interroger de manière individuelle sur les futilités que nous pouvons dire au quotidien. En effet, l’usage que nous faisons de notre langue n’est pas sans impact. A ce sujet, le Prophète (ﷺ) disait :
« Que celui qui croit en Allah et au jour dernier dise du bien ou qu’il se taise »
Et si ce genre de récit vous a plu, vous serez certainement intéressé de lire l’article sur une femme qui a eu un lien exceptionnel avec le Prophète (ﷺ).
Que la paix soit sur vous !